Madame la Présidente,
Depuis plus de deux ans, les équipes pédagogiques, les
secrétariats de diplômes et, par conséquent les étudiants, sont confrontés à
d’insupportables difficultés du fait des mauvaises conditions d’implantation de
ce logiciel de scolarité qui a pour nom Apogée.
Votre élection à la présidence de l’Université a permis de
rompre avec le déni de ces difficultés qui tenait trop souvent lieu de réponse
et qui, parfois, a pu atteindre à des sommets d’obscénité. Un audit a été
annoncé, ce dont nous ne pouvons que nous féliciter, notamment compte tenu des
échéances qui sont nôtres sous l’effet des contraintes impliquées par la
nouvelle loi régissant les diplômes universitaires.
Dans l’attente des résultats de cet audit qui, je l’espère,
nous permettront d’adopter enfin un logiciel de scolarité répondant à un cahier
des charges simple et fonctionnel, je me permets de vous écrire pour protester
solennellement contre deux règles de scolarité qui nous sont imposées pour des
raisons purement idéologiques et qui me paraissent contrevenir gravement aux
intérêts de nos étudiants, et notamment de ceux qui sont contraints d’occuper
un emploi salarié tout en poursuivant leurs études.
Ces deux règles sont :
1) la
renonciation
2) le
non report des notes inférieures à 10 d’une année à l’autre
Madame la Présidente, comme vous le savez, la procédure dite
de « renonciation » ne relève en rien d’une contrainte technique, ni
d’une obligation ministérielle. Cette décision relève de notre seule volonté et
c’est donc à ce titre que, depuis deux ans, l’UFR Arts que j’ai l’honneur de
diriger, la conteste. Nous la contestons pour des raisons pratiques,
pédagogiques et politiques.
Pratiques, dans la mesure où cette règle complique
singulièrement les procédures d’obtention du diplôme. Introduire entre l’examen
de la première session et celui du rattrapage une intervention obligatoire de
l’étudiant compromet la saisie de la seconde note. Le lot d’informations que
nous devons donner aux étudiants, notamment concernant les procédures
d’inscription pédagogique, est déjà assez consistant pour ne pas avoir à
rajouter ainsi des éléments parasitaires. De fait, si la procédure est
directement effectuée par les secrétariats pour les diplômes à faible effectif,
pour les diplômes où le nombre d’inscrits se compte par centaines, les
secrétariats et responsables pédagogiques se retrouvent régulièrement
confrontés à des situations ingérables au moment où se réunissent les jurys, la
seconde note, bien que saisie, demeurant hors d’état d’être intégrée dans le
PV.
Pédagogiques, dans la mesure où cette renonciation
contrevient à la possibilité que peut avoir un étudiant de vouloir améliorer
ses résultats, lors même qu’il a obtenu la moyenne. En effet, pour peu que
l’évaluation soit pensée autrement que comme une simple sanction, mais qu’elle
participe d’un processus d’apprentissage, la seconde session ne se limite pas à
proposer une répétition de l’examen, mais implique un travail d’accompagnement
auquel tout étudient devrait pouvoir avoir accès, sans avoir à craindre de
perdre le bénéfice d’une note déjà obtenue. La règle qui régissait la scolarité
jusqu’à l’implantation d’Apogée, à savoir l’inscription de la meilleure des
deux notes nous semble correspondre bien mieux à l’esprit des pédagogies mises
en chantier dans notre université que cette renonciation aux relents
culpabilisateurs pour le moins douteux.
Politiques, dans la mesure où ce sont les étudiants qui sont
dans des situations précaires qui sont le plus directement touchés par une
telle mesure : ces étudiants pour qui être en université ne va pas de soi ;
ces étudiants pour qui nos références et attitudes paraissent souvent relever
de logiques obscures ; ces étudiants qui abandonnent trop souvent le cursus
qu’ils voulaient suivre faute d’avoir été mis en position de constater une
progression dans leurs acquisitions ; ces mêmes étudiants dont, Madame la
Présidente, vous avez à cœur de défendre l’accès à l’université.
Pour les mêmes raisons, nous contestons la règle du non
report d’une note inférieure à la moyenne d’une année sur l’autre. Ici aussi,
c’est le public le plus fragile dont la situation est rendue plus précaire
encore, c’est-à-dire ceux de nos étudiants qui, notamment pour des raisons
économiques, sont contraints de consacrer deux années pour obtenir ses UE, là
où un étudiant à plein temps peut effectivement jouir d’une compensation entre
les notes qu’il aura obtenues sur une seule année. Il est à ce titre scandaleux
qu’un étudiant ayant obtenu un 9 et qui « redouble », se voit
contraint de resuivre dans son intégralité ce cours, là où un autre ayant
obtenu la même note pourra le faire valider par compensation. Pour une
formation à faible effectif, il est toujours possible de surseoir à semblable rupture
d’égalité en conservant la mémoire de la note obtenue l’année précédente, mais
pour un secrétariat gérant plusieurs centaines d’étudiants, c’est là chose
impossible.
Madame la Présidente, ces deux règles de scolarité ne font
que contribuer à l’échec de nos étudiants. Les raisons sociales, économiques et
culturelles qui sont à la source de cet échec sont déjà assez fortes pour que
nous ne cherchions pas à les amplifier par des mesures aussi ineptes que
celles-ci.
Nous demandons que ces règles soient abrogées ou, à défaut,
que chaque formation ait la capacité de demander d’en être exemptée.
Je vous prie de croire, Madame la Présidente, à l’expression
de mes salutations respectueuses et cordiales.
Eric Lecerf
Directeur de l’UFR Arts, Philosophie, Esthétique
Élu au Conseil d’Administration
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire